Une personne poursuivie pour des faits de blanchiment avait accepté une proposition de peine du procureur de la République financier dans le cadre d’une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (“CRPC”).
Pour rappel, cette procédure parfois décrite comme un plaider-coupable à la française, a été instaurée par la loi du 9 mars 2004[1]. Elle est issue de l’idée selon laquelle la participation de la personne poursuivie au processus judiciaire par son aveu, permet une meilleure efficacité de la justice.
En pratique, le Ministère public propose une peine à la personne poursuivie qui a la possibilité de l’accepter ou non. En cas d’acceptation, et afin de respecter le principe de séparation des autorités de poursuite et de jugement, la proposition de peine est soumise au Président du Tribunal judiciaire ou à un juge délégué qui peut seulement l’homologuer, ou refuser l’homologation pour les motifs précisés à l’article 495-11-1 du Code de procédure pénale[2].
Dans le cas d’espèce, le juge délégué par le président du Tribunal judiciaire avait rendu une ordonnance de refus d’homologation dans le cadre d’une procédure de CRPC, le 6 juillet 2021.
Le procureur de la République financier soumettait une nouvelle proposition de peine auprès du juge délégué par le président du Tribunal judiciaire.
Le 12 octobre 2021, la nouvelle proposition de peine était déclarée irrecevable. Le procureur de la République financier formait alors un pourvoi en cassation.
I. Le refus d’homologation d’une CRPC fait obstacle à la mise en œuvre d’une seconde CRPC
Dans un arrêt du 17 mai 2022, la Chambre criminelle rappelle, dans un premier temps, que l’article 495-12 du Code de procédure pénale[3] ne prévoit pas la possibilité de mettre en œuvre une seconde CRPC en cas de refus d’homologation d’une première proposition de peine par le Parquet.
En effet, le texte prévoit qu’en cas d’ordonnance de refus de CRPC, le Parquet a la possibilité de mettre en œuvre les procédures de l’article 388 du Code de procédure pénale[4], c’est dire la comparution volontaire ou immédiate, ou encore la convocation ou la citation, ou de requérir l’ouverture d’une information judiciaire.
Dans cet arrêt, la Cour de cassation s’appuie sur les travaux parlementaires de la loi Perben I du 9 mars 2004 et de la loi du 23 octobre 2018. Elle en déduit que le législateur n’a, en l’absence de disposition expresse en ce sens, pas souhaité élargir le domaine de l’article 495-12 du Code de procédure pénale en permettant au procureur de la République, face à une peine non homologuée par le juge, de proposer une nouvelle peine via cette même procédure.
II. L’absence de recours contre une décision de refus d’homologation d’une CRPC
Les juges du Quai de l’Horloge confirment par ailleurs leur position selon laquelle aucun texte ne prévoit de droit de recours en cas de refus d’homologation d’une CRPC.
Sur ce point, le Conseil Constitutionnel avait déclaré que l’absence de voie de recours contre une décision de refus d’homologation d’une CRPC n’était pas contraire à la Constitution, dès lors qu’en cas de refus d’homologation, la personne est en principe renvoyée devant le Tribunal correctionnel et n’est alors pas privée de son droit à un recours effectif[5].
La Cour émet toutefois une réserve en considérant qu’un recours est possible lorsque le juge homologateur a excédé ses pouvoirs.
En l’espèce, en l’absence de disposition relative à la possibilité de proposer une seconde CRPC, la décision de refus d’homologation de la seconde proposition ne constitue pas un excès de pouvoir de la part du juge homologateur, de sorte que le recours en cassation est irrecevable.
Ainsi, la Cour vient une nouvelle fois limiter l’étendue de la notion d’excès de pouvoir après avoir récemment considéré que l’absence de motivation de l’ordonnance de refus d’homologation ne constituait pas un excès de pouvoir[6], en retenant que par sa décision de refus, le juge homologateur n’a pas méconnu son office ou l’étendue de ses pouvoirs.