Publication
8 juillet 2025

Actualités de l’AFA en matière de lutte contre la corruption & atteintes à la probité

Huit ans après l’entrée en vigueur de la loi Sapin II, l'AFA poursuit ses efforts de lutte contre la corruption et autres atteintes à la probité.

 

Deux ans après la nomination le 27 juillet 2023 de sa nouvelle directrice, Madame Isabelle Jégouzo, l’Agence française anti-corruption (AFA) continue à faire de la sensibilisation, du conseil et du développement de la connaissance relative aux atteintes à la probité, une priorité.

 

Un “nouvel élan” de l’AFA  marqué par son adaptation à l’évolution de ses enjeux, notamment par les contrôles et les missions de sensibilisation.

En juillet 2025, l’AFA a publié son rapport annuel[1] dans lequel elle souligne, parmi les faits marquants de l’année 2024, sa réorganisation, la création de l’Observatoire des atteintes à la probité lui ayant permis d’approfondir son appréhension de la réalité des atteintes à la corruption et le développement continu de ses travaux relatifs à l’impact de la criminalité organisée et du narcotrafic.

Les contrôles mis en place par l’AFA se sont également poursuivis de façon soutenue en 2024 avec 17 contrôles d’acteurs publiques et 10 contrôles initiaux auprès d’acteurs économiques. L’AFA annonce notamment avoir accru les contrôles sur les collectivités territoriales, en procédant de plus en plus souvent à des vagues de contrôles d’entités du même type. En outre, elle indique privilégier de plus en plus une approche sectorielle permettant d’articuler secteur public et secteur privé.

L’AFA a également rappelé être intervenue en 2024 encore dans le cadre de programme de mise en conformité prévu par une CJIP.

 

Pour aller plus loin :

 

Enfin, parmi les enjeux de demain, l’AFA met en avant l’importance de promouvoir un texte ambitieux de directive européenne pour la lutte contre la corruption, qui a été proposée par la Commission européenne en mai 2023 et dont les négociations se sont poursuivies en 2024.

 

Le 3ème diagnostic sur les dispositifs anticorruption dans les entreprises confirme l’effet positif de la loi Sapin II, tout en soulignant les difficultés persistantes des PME.

 

Publié en octobre 2024, ce document s’inscrit dans le prolongement de la loi Sapin II, adoptée huit ans plus tôt, qui impose aux entreprises la mise en place de dispositifs de prévention de la corruption. Il fait suite à deux précédents diagnostics nationaux réalisés en 2020 et 2022. Cette troisième édition offre une analyse approfondie de l’appropriation par les entreprises françaises de cette obligation légale. Elle permet également de mesurer les évolutions constatées depuis les précédents rapports, tout en identifiant les principales difficultés rencontrées par les entreprises dans la mise en œuvre de ces dispositifs[2].

 

très bon niveau de connaissance des infractions de corruption et de trafic d’influence

Une enquête a été réalisée auprès d’entreprises privées de tailles différentes (petites et moyennes, intermédiaires et grands groupes dont le siège social est en France ou à l’étranger), via un questionnaire anonyme auquel ont répondu en majorité des responsable éthiques, déontologique ou de conformité[3] de manière déclarative. Deux thèmes ont été abordés dans le cadre de cette enquête : la connaissance des infractions de corruption et de trafic d’influence, et la prévention / détection de ces infractions.

 

1/3  des entreprises confrontées à au moins un cas de corruption ou de trafic d’influence

Résultats clés de l’enquête :

* Près d’1/3  des entreprises ont été confrontées à au moins
un cas de corruption ou de trafic d’influence ces cinq dernières années.
Action(s) engagée(s) dans ce cas :
Enquête interne : 80%
Sanction disciplinaire : 63%

* 14% des entreprises ont reçu des sollicitations de paiement de facilitation.
Action(s) engagée(s) dans ce cas :
Enquête interne : 88%

* Fonctions les plus exposées :
Achats : 83%
Fonctions commerciales : 80%
Direction générale : 57%

* Mesures de prévention et de détection :
Mise à jour annuelle de :
Cartographie des risques : 42%
Formation : 40%
Contrôles et évaluations internes : 33%

* Mesure la plus difficile à mettre en œuvre :
Evaluation des tiers : 49%
Cartographie des risques : 29%

 

Globalement, les résultats font ressortir un “effet positif et durable de la loi Sapin II” ainsi qu’un “très bon niveau de connaissance des infractions de corruption et de trafic d’influence”, bien que l’AFA mette en garde sur les biais liés aux répondants des enquêtes par questionnaire[4]. Ils relèvent toutefois des difficultés plus importantes pour les plus petites entreprises à mettre en œuvre les mesures de prévention des corruptions et des difficultés pour certaines entreprises à évaluer leurs tiers et établir leur cartographie des risques. Sont prévus en conséquence de nouvelles publications et de nouveaux outils sur ces sujets ainsi que des éléments venant compléter le guide à destination des PME et ETI publié en 2021[5].

 

Les publications de l’AFA deviennent toujours plus spécifiques et sectorielles.

 

L’AFA a publié en octobre 2024 un guide adressé aux établissements publics de santé ainsi qu’en novembre 2024 un guide destiné aux élus locaux.

Le guide adressé aux établissements publics de santé intervient à la suite de contrôles réalisés par l’AFA ayant révélé un besoin spécifique de sensibilisation des acteurs publics de la santé sur le risque de corruption[6]. Ce secteur est particulièrement pertinent en matière de lutte anticorruption au vu des enjeux sociaux et économiques importants qu’il porte[7] et des risques qu’il engendre. En effet, le secteur de la santé est exposé à des risques financier, juridique et de réputation importants en raison de différents facteurs, tels que l’importance des flux financiers entre les secteurs public et privé, les situations d’urgence auxquelles il doit parfois faire face, une concurrence accrue ou encore les partenariats entre les établissements de santé et les acteurs économiques produisant ou commercialisant des produits de santé[8]. Ce guide, venant compléter les Recommandations de l’AFA, s’organise autour des mêmes trois piliers (engagement de l’instance dirigeante, cartographie des risques et gestion des risques) et propose une approche concrète avec notamment plusieurs cas pratiques illustrant les risques auxquels les professionnels de santé sont confrontés[9].

 

Pour aller plus loin : L’annonce de l’AFA du lancement de contrôles dans le secteur de la santé exposé aux risques d’atteinte à la probité

 

Le guide destiné aux élus locaux a pour but de former ceux-ci à la gestion des risques d’atteintes à la probité, en raison des risques particulièrement importants auxquels ils sont exposés dans le cadre de leur fonction et de leurs compétences (aménagement du territoire, gestion des services publics, passation des marchés publics et soutien aux initiatives des citoyens) pour lesquels les dépenses publiques atteignent environ 105 milliards d’euros par an[10]. L’AFA, conjointement avec l’Association des Maires de France et des Présidents d’Intercommunalité, a ainsi mis en place ce guide qui se veut “opérationnel et concret”, notamment grâce à des fiches thématiques concrètes, afin d’accompagner les élus locaux dans la mise en place des dispositifs anticorruption adaptés à leurs spécificités[11].

 

Pour aller plus loin : CJIP Paprec : retour sur la répression pénale en cas de violation des règles d’attribution des marchés publics

 

Une analyse des atteintes à la probité enregistrées par les services de sécurité fait apparaitre une hausse de 8,2% des enregistrements en 2024.

 

L’AFA a réalisé des analyses quant au traitement des atteintes à la probité. D’une part, elle a publié, en partenariat avec le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), en avril 2025 , une étude relative aux atteintes à la probité enregistrées par les services de sécurité en 2024, issue des données enregistrées par les services de police et de gendarmerie[12]. Il en ressort notamment une hausse de 8,2% des enregistrements des infractions d’atteintes à la probité par rapport à 2023[13] et une concentration de ces infractions en Corse et dans les régions et départements et collectivités d’Outre-mer, suivis de Paris[14]. Les infractions ayant le plus augmenté en valeur absolue sont la corruption, la prise illégale d’intérêts et le favoritisme[15], étant précisé que des infractions connexes, majoritairement des fraudes ou des tromperies, sont régulièrement attachées aux infraction d’atteintes à la probité[16].

 

L’Observatoire des atteintes à la probité a publié une analyse des décisions de première instance relatives aux atteintes à la probité.

 

L’Observatoire des atteintes à la probité au sein de l’AFA a publié en décembre 2024 une note d’analyse des décisions de 2021 et 2022 de première instance relatives aux atteintes à la probité. Ce document, qui se fonde sur 504 décisions de justice[17] et présente une analyse des infractions pénales, du profil des prévenus, des secteurs d’activités, des modes opératoires, de la procédure et du traitement judiciaire, révèle par exemple que : la corruption, quelle que soit sa forme, est l’infraction d’atteinte à la probité la plus fréquente[18], suivie du détournement de fonds ou de biens publics[19]. Il existe un taux de condamnation particulièrement élevé, avec 71,7% de déclarations de culpabilité[20]. Par ailleurs, bien que 51,6% des décisions de justice concernent le secteur public[21], l’interpénétration entre les secteurs privé et public est un facteur majeur de risque d’atteintes à la probité dans le secteur privé[22].

 

Pour aller plus loin : Analyse par l’AFA des décisions de justice de première instance en matière d’atteinte à la probité sur les années 2021-2022

 

En conclusion, l’AFA confirme ces derniers mois son rôle central dans la lutte contre la corruption en poursuivant une dynamique soutenue de production d’outils pratiques, de diagnostics sectoriels ou encore d’analyses statistiques. L’AFA démontre sa capacité à adapter son action aux besoins spécifiques des acteurs publics et privés, comme en témoignent les guides dédiés aux établissements de santé et aux élus locaux, tout en continuant à évaluer l’impact de la loi Sapin II et à documenter de manière approfondie les infractions d’atteinte à la probité à travers des partenariats divers, comme avec le SSMSI. Face aux fragilités et difficultés persistantes dans la mise en œuvre des dispositifs anticorruption, l’AFA s’engage à enrichir encore ses publications et à fournir des outils ciblés, dans une logique d’amélioration continue de la prévention et de la maîtrise des risques d’atteintes à la probité.

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